[00:00:00] Général à vendre - Les Freres Jacques [00:00:03] Written by:Francis Jean Blanche/Pierre Philippe [00:00:07] De bon matin me suis levé c'é tait dimanche [00:00:11] A la carriole j'ai attelé la jument blanche [00:00:15] Pour m'en aller au marché [00:00:17] Dans le chef lieu du comté [00:00:19] Paraî t qu'y avait des gé né raux à vendre [00:00:22] Mais le soleil é crasait tant la route blanche [00:00:26] La jument s'arrê tait si souvent sous les branches [00:00:29] Que lorsque je fus rendu [00:00:31] On ne m'avait pas attendu [00:00:33] Et tous les gé né raux é taient vendus [00:00:37] Pourtant là bas tout au fond du champ de foire [00:00:40] Par un coup de chance il en restait encore un [00:00:44] Il n'é tait pas couvert de gloire [00:00:46] Mais avec un peu de ripolin [00:00:48] Il pouvait faire encore trè s bien [00:00:52] Je l'ai é changé contre un cageot de pommes pas mû res [00:00:55] Quatre choux fleurs et une tartine de confiture [00:00:59] Tout ç a pour un gé né ral [00:01:01] C'é tait vraiment pas trop mal [00:01:03] Et puis je l'ai chargé dans la voiture [00:01:06] A la maison on m'a fait des reproches amers [00:01:10] Encore une fois paraî t que je m'é tais laissé faire [00:01:14] Un gé né ral dans cet é tat [00:01:16] Ç a valait beaucoup moins que ç a [00:01:18] Mais puisque c'é tait fait tant pis pour moi [00:01:21] Et puis les gosses ont eu peur de sa moustache [00:01:25] Elle é tait rousse et ç a les faisait pleurer [00:01:29] On lui a coupé d'un cô té [00:01:30] Mais le chien s'est mis à aboyer [00:01:32] Alors on a laissé l'autre moitié [00:01:36] Il fichait rien pour pas salir son beau costume [00:01:40] De temps en temps il é pluchait quelques lé gumes [00:01:43] Ou ré parait l'escabeau [00:01:45] Ou dé bouchait le lavabo [00:01:47] Mais y ne savait mê me pas jouer du piano [00:01:52] Pourtant certains soirs certains soirs d'é té [00:02:00] Le gé né ral s'asseyait sur la paille [00:02:09] Et les yeux perdus dans l'immensité [00:02:18] Il nous racontait ses batailles [00:02:26] Il nous parlait des dardanelles [00:02:28] Quand il n'é tait que colonel [00:02:29] Et de la campagne d'orient [00:02:31] Quand il n'é tait que commandant [00:02:33] L'é popé e napolé onienne [00:02:35] Quand il n'é tait que capitaine [00:02:37] Et puis la guerre de cent ans [00:02:39] Quand il n'é tait que lieutenant [00:02:40] Les croisades et pé pin le bref [00:02:42] Quand il n'é tait que sergent chef [00:02:44] Et les é lé phants d'hannibal [00:02:46] Quand il n'é tait que caporal [00:02:48] Les thermopyles lé onidas [00:02:50] Quand il n'é tait que deuxiè me classe [00:02:52] Et ramsè s ii la premiè re guerre [00:02:54] Quand sa mè re é tait cantiniè re [00:02:59] Puis le gé né ral jusqu'au petit matin [00:03:08] Dé roulait le fil de son immense histoire [00:03:17] Puis il s'endormait sur sa botte de foin [00:03:26] Et nous sans parler [00:03:30] Nous rê vions de gloire [00:03:36] Il est resté comme ç a chez nous [00:03:39] Jusqu'à l'automne [00:03:41] Sans travailler sans trouver la vie monotone [00:03:43] Ç a nous a mê me é tonné s [00:03:45] D'apprendre par le curé [00:03:47] Qu'il avait fait deux jumeaux à la bonne [00:03:50] Et puis voilà que par un beau matin [00:03:53] De dé cembre [00:03:54] Il est entré sans mê me frapper [00:03:56] Dans ma chambre [00:03:58] Il venait de lire dans le journal [00:04:00] Qu'on le nommait maré chal [00:04:01] Alors il nous quittait c'é tait fatal [00:04:05] Je l'ai reconduit en carriole jusqu'à la ville [00:04:09] On m'a rendu mes choux fleurs [00:04:11] Et mes cageots [00:04:12] Et sans é motion inutile [00:04:14] Sans pleurs et sans se dire un mot [00:04:16] On s'est quitté s en vrais hé ros [00:04:20] A la maison la vie a repris sans aventure [00:04:24] Y a plus personne pour nous chiper des confitures [00:04:27] Le gé né ral au bistrot [00:04:29] Avait planté un drapeau [00:04:31] Pour la patrie j'ai payé la facture [00:04:35] Je ne suis plus jamais retourné au marché